Centre d’Excellence post-récolte de cacao
Mme Tcheumtchoua Toukam Aristide, épouse Yemeli présidente de la Société Coopérative simplifiée cacao du Cameroun(SCSC) dans le département de la Lékié, partenaire des chocolatiers français.
« Tout passe par le prix, le planteur est accroc aux prix. Il ne suit que là où le prix est élevé et plus le prix sera élevé, plus on sortira du mauvais cacao. Quand le prix est élevé, il comprend qu’il faut être patient. »
En quoi consiste le traitement Post- récolte ?
Le Traitement Post-récolte, c’est le traitement de la fève jusqu’au stockage. Il comporte plusieurs étapes : la récolte, la fermentation qui est une étape très importante pour nos chocolatiers engagés qui achètent nos fèves. Car, au moment de la fermentation, on essaie d’améliorer la qualité afin de ressortir tous les aromes- chocolat afin que les chocolatiers puissent mieux travailler leur chocolat dans leur laboratoire. Ensuite, il y a le séchage qui est une autre à ne pas négliger dans le traitement post- récolte car, on quand si on le rate, on n’arrive pas à obtenir ce Cacao d’Excellence recherché par nos chocolatiers. Ensuite, il y a le stockage, par la suite l’exportation voilà en gros en quoi consiste le Traitement –Post récolte.
Comment procédez-vous à la vulgarisation auprès des producteurs ?
Pour le producteur à la base, le traitement post –récolte, c’était un traitement plutôt très lourd car, avant la saison ne commence, il patiente beaucoup, il ne vit que du cacao ça prend du temps pour être récolté, pour avoir du gain il faut attendre 6 mois . Quand on lui impose le traitement post -récolte (2-à jours de traitement). Pour faire adhérer le producteur à ce projet, il a fallu qu’on lui prévienne que le prix sera plus élevé par rapport au cacao simple. Ce qui vulgarise, c’est le prix qu’on donne au planteur 1650 Fr CFA le KG.
Comment en êtes-vous arrivé- là ?
Je suis dans la cacaoculture simple depuis longtemps, pas comme témoin. C’est parce que mes parents y sont . Je m’y plonge car, j’ai vu comment ils souffraient du phénomène de coxage. Les coxeurs qui passaient déjà avec leurs balances truquées, les prix instables ,800,900 FCFA le Kg. Cela m’a poussé à contacter un chocolatier français sur internet, après avoir à plusieurs reprises essayé de le contacter, celui-là a réagi positivement. Ca n’a pas toujours été facile. Il a dit, puisque c’est internet, de lui envoyer d’abord des fèves de cacao, il va payer plus tard. J’ai osé, j’ai envoyé 200 KG de fèves sans attendre .j’ai payé le transport avec le risque qu’il pouvait ne pas m’envoyer l’argent plu tard . Tel qu’il me dit, il s’est demandé quelle est cette femme qui m’a fait confiance aveuglement ? Il est arrivé au Cameroun je me suis formée dans le secteur des coopératives. Il m’a dit Aristide, on peut faire quelque chose pour ton village, pour l’officialiser, il fallait passer par une coopérative, d’où la création de la coopérative (la SCOOP CA) dont je suis la présidente . J’ai dit ça, c’est ça sérieux, je peux en faire un métier, les gens peuvent aussi gagner derrière, pourquoi ne pas la professionnaliser ? Le phone Mood E Phone, je me suis formée en ligne en trois mois j’ai eu mon diplôme.
Comment parvenez-vous à combattre le coxage ?
C’est très simple. Nous travaillons directement avec les chocolatiers. Le prix est mieux payé. Ce qui les pousse à venir vers nous, et ça diminue progressivement. C’est vrai, en ce qui concerne le traitement post-récolte, on ne prend pas certaines fèves, ce qui rapporte plus aux planteurs à travers la valorisation de son cacao. Tout passe par le prix, le planteur est accroc aux prix, il ne suit que là où le prix est élevé et plus le prix sera élevé, plus on sortira du mauvais cacao, le planteur va comprendre et viendra vendre son cacao là où il sera mieux payer et il vivra de sa culture voilà le secret et la solution. Quand le prix est élevé, il comprend qu’il faut être patient. 20 jours supplémentaires pour un Cacao d’Excellence sur les 3-4 mois déjà attendus pour que sa production augmente ,quand le prix sera élevé ,il sera encouragé à venir donner son cacao et le phénomène de coxage ,de cacao prix bas va disparaitre.
Quelles sont les difficultés rencontrées ?
C’est l’impatience des planteurs, le dialogue. On vient avec un nouveau projet ce n’est pas facile de l’intégrer. La plus grosse difficulté, c’est la Communication et surtout l’impatience des planteurs. Les Centres d’Excellence visent à valoriser les planteurs et le cacao à l’international. Nous ne sommes pas dans des grosses plantations industrielles, on respecte les nouvelles exigences du marché international : pas de déforestation, respect du travail des enfants etc on ne travaille pas avec les enfants dans la cacaoculture cela est interdit, car ils fréquentent ils peuvent juste venir assister les parents par moment. A travers le Cacao d’Excellence, certains jeunes qui habitaient à Yaoundé sont revenus travailler à la coopérative, les épargnes coopératives permettent aux parents d’inscrire leurs enfants pendant la Rentrée scolaire. Ensuite, il y a la déforestation qui est interdite, on a de grands arbres dans nos plantations qui protègent nos forêts . On emmène les planteurs à travers l’APAF (l’Association pour les arbres fertiles fruitiers) qui nous a enseignés à identifier les arbres qui pouvaient naturellement, repousser ,fertiliser les sols, quand on leur a présenté ces arbres, ils ont compris qu’ils pouvaient aussi faire des économies au niveau des intrants naturels . Pourquoi toujours acheter des produits pour pulvériser alors qu’il existe des produits naturels ? Travailler à la machette, c’est blesser l’arbre qui va mettre trois ans à se cicatriser et qui va réduire la productivité . Les planteurs comprennent qu’ils gagnent plus avec ce système là et qu’ils profitent mieux de leurs plantations en économisant au niveau des intrants.
Comment le Cacao d’Excellence a-t-il pu améliorer l’image du cacao Camerounais à l’international ?
Là je suis contente (rires) à travers le Cacao d’Excellence, j’ai beaucoup voyagé, j’ai pu découvrir à quel point le cacao camerounais a pris de l’ampleur depuis 5 ans , il était dans l’anonymat, perdu or nous faisons partie des plus grands producteurs. J’ai déjà visité au moins 50 chocolateries, on reconnait le Cameroun grâce à son cacao de qualité, voilà la révolution, la révolution c’est aussi les emplois crées, c’est la valorisation que ça crée au niveau des ministères, nos villages.Tous ceux qui avaient abandonné leurs plantations, reprennent leurs plantations en main, il y a cinq ans, on est passé d’une tonne à 150 tonnes dans ma coopérative de nos jours.
Comment fonctionne un Centre d’Excellence ?
Il y a plusieurs étapes .On y trouve des gens chargés de la récolte, du cabossage, de la fermentation, du séchage après, on exporte .Voilà les étapes du traitement post-récolte. Toutes ces étapes respectées, on travaille sur commande. On aurait souhaité qu’elles soient plus grandes, on ne vend pas tout notre cacao car, c’est en fonction de ces commandes qu’on travaille. Au fur et mesure que ce travail du cacao d’excellence sera bien fait, le chocolatier européen, américain,,, et tous les cacaoculteurs camerounais vivront de leur labeur .Avec les chocolatiers français, on travaille sur la base de la confiance ,on a des contrats c’est vrai, la relation est très humaine. Lors des voyages, je vais dans les familles d’accueil ,dans les familles et non dans les hôtels ,on partage nos cultures à travers cela, il y a des échanges, des formations ,on a été formé en chocolaterie, on aurait bien aimé avoir au niveau de notre coopérative ,une toute petite machine afin de tester aussi nos fèves et les transformer en chocolat pour voir ce que ça donne .On a l’habitude d’avoir notre fève de cacao mais, gouter le chocolat c’est difficile .
Quelles sont vos attentes du gouvernement ?
C’est de nous accompagner, on a besoin de renouveler les équipements. L’investissement est lourd, on fait avec les moyens de bord et ça se dégrade très vite surtout les formations auprès des jeunes. Il y a déjà une structure qui le fait c’est vrai mais, on aurait souhaité qu’il nous accompagne dans tout le village .Je ne suis pas la seule coopérative qui fait dans le Cacao d’Excellence, je parle des autres villages. En tant que dame, ce n’était pas facile au départ, la majorité des producteurs sont des hommes, il y a des grands parents, des parents, il a fallu que j’agisse avec beaucoup de rigueur, respect , confiance, et de traçabilité au sein des villages, de la coopérative, des coopérateurs et avec les artisans chocolatiers. Nos objectifs, c’est de continuer dans cette qualité de cacao, c’est d’aller jusqu’au bout, de valoriser le métier, former tout le monde afin qu’ils puissent être professionnels, c’est d’avoir plus de clientèle.
Que conseillez-vous aux producteurs ?
C’est la patience, il ne faut pas être pressé, c’est de se professionnaliser, faire des recherches, d’aimer ce qu’on fait, d’oser dans la vie, il faut prendre des risques, de perdurer, d’avoir le sens du respect.
Itw réalisée par Joseph Kapo